Pendant l’hiver austral, l’Argentine a connu une épidémie de Grippe A. Les travailleurs de l’entreprise Kraft Foods, multinationale nord-américaine et numéro 2 mondial du secteur alimentaire, ont mené une grève pour réclamer des mesures élémentaires d’hygiène comme… avoir du savon pour se laver les mains ! Ce fait même montre à quel point les capitalistes méprisent la classe ouvrière. Cependant, dirigés par un comité d'usine, élu par la base, les ouvrières et ouvriers de Kraft-Argentine remportent une première bataille contre la direction.
Néanmoins, quelques semaines plus tard l’entreprise contre-attaque : le 18 août elle annonce le licenciement de 160 travailleurs dont ceux de tout le comité d'usine, sans aucune indemnité car leur licenciement serait « justifié ».
Cette attitude cynique de l’entreprise a provoqué l’indignation de l’ensemble des ouvriers du site et la réponse fut immédiate : une équipe après l’autre vote la grève en assemblée générale pour la réincorporation des 160 licenciés ! En quelques heures la production de l’usine est arrêtée et commence alors la lutte de 2600 ouvriers contre une multinationale impérialiste qui dure maintenant depuis plus de 40 jours.
Des licenciements clairement politiques
Durant la première moitié de l’année 2009, Kraft a dégagé un profit de plus de 1 milliard d’euros, c’est-à-dire une augmentation de 10,6% par rapport à l’année dernière. Donc il ne s’agit évidemment pas de licenciements dits « économiques » mais bien d’une attaque contre l’organisation syndicale des travailleurs. La direction justifie les licenciements par la « gêne » occasionnée par la grève de juillet, pourtant cette grève spontanée fût menée principalement par l’équipe de l’après-midi alors que la plupart des licenciés appartiennent à l’équipe du soir où se trouvent les délégués les plus combatifs !
En réalité, face à la crise économique, Kraft Foods a l’intention de mener une politique offensive contre les conditions de travail des ouvriers, notamment en supprimant l’équipe du soir. Non seulement cette suppression impliquerait 700 licenciements de plus, mais elle amènerait nécessairement à une augmentation des rythmes de travail pour les équipes qui resteraient. Mais pour ce faire la direction a besoin de se débarrasser du comité d'usine et de tout l'activisme combatif. La grève de juillet était alors l’occasion de licencier les « gêneurs ».
Kraft, l’Etat, l’ambassade des Etats-Unis, le patronat argentin, la bureaucratie syndicale : un Front Uni contre la classe ouvrière !
La lutte des ouvriers de Kraft Foods est sans doute le conflit ouvrier le plus important des dernières années en Argentine. Au-delà de l’ampleur qu’a pris le conflit et sa répercussion dans les médias nationaux, il intervient au milieu d’une crise politique entre les différents camps bourgeois, qui dure depuis l’année dernière et qui s’est aggravée après la défaite du parti de la présidente, Cristina Kirchner, aux élections législatives.
Dans ce contexte de crise au sommet, depuis le début de l’année, plusieurs luttes se sont développées. Celles-ci se caractérisaient par leur radicalité dans la lutte contre le patronat et ses plans de licenciements, par l’unité entre intérimaires et travailleurs effectifs et par leur organisation antibureaucratique qui reposait sur la volonté de la base. Dans ce même contexte, il nous faut naturellement mentionner la grande victoire obtenue début août par les ouvrières et ouvriers de l’usine autogérée Zanon qui ont arraché l’expropriation définitive au gouvernement provincial ; expropriation à laquelle la bureaucratie de la CGT s’était opposé en disant que l’ « on était en train de donner l’usine aux gauchistes ».
La lutte des ouvriers de Kraft s’inscrit dans ce mouvement ouvrier. Elle est un exemple d’organisation des travailleurs indépendante des bureaucraties syndicales. C’est pourquoi les capitalistes locaux, l’Etat et la bureaucratie syndicale ont fait un front uni avec la direction de Kraft contre les travailleurs. En effet, les patrons locaux regroupés dans l’Union Industrielle Argentine et dans la Coordination des Industries de produits de l’Alimentation – dirigée par un ex-fonctionnaire de la dictature - avaient exigé au gouvernement une « solution immédiate » à l’occupation illégale de l’usine, autrement dit, qu’il fallait vite réprimer cette grève. La bureaucratie syndicale, quant à elle, déclarait que la répression qui s’annonçait contre les ouvriers était le « destin de ceux qui osent lutter contre son autorité ».
Ainsi le vendredi 25 septembre la répression exigée par la direction et le patronat local et, en quelque sorte, souhaitée par la bureaucratie syndicale, frappa les ouvrières et ouvriers en grève. Des centaines de policiers avec des chiens d’attaques et la police montée, ont tiré avec des balles en caoutchouc et des gaz contre la foule qui soutenait à l’extérieur les ouvriers qui occupaient l’usine. La police a ensuite chargé contre les ouvriers à l’intérieur de l’usine alors même que ceux-ci, en voyant l’énorme opération répressive, avaient décidé de sortir pacifiquement sans affrontement avec la police. Le soir même le site était devenu un centre de détention où l’on interrogeait les ouvriers interpellés, à l’image de ce qui se faisait sous la dictature fasciste argentine.
(Vidéo de la répression)
Grâce à la police nationale argentine, l’entreprise impérialiste nord-américaine Kraft a repris le contrôle du site. Plus tard on apprenait que Kraft Foods avait payé près de 200 mille euros pour l’opération policière et que l’ambassade des Etats-Unis avait fait pression sur le gouverneur de Buenos Aires pour qu’il y ait « une solution durable » au conflit.
Aujourd’hui l’usine est militarisée avec 300 policiers à l’intérieur derrière les ouvriers forcés de reprendre le travail. La direction a suspendu des ouvriers soupçonnés d’avoir soutenu la lutte des licenciés, elle fouille les casiers des travailleurs et ne laisse entrer aucun délégués. Chez Kraft Foods-Argentine la dictature capitaliste est plus claire que jamais !
Malgré le fait que l’activité a repris sous la menace de suspension et sous la militarisation de l’usine, la lutte n’est pas terminée. Bien que la direction ait consentie à réintégrer 30 des ouvriers licenciés, le comité d'usine et une grande partie de l'activisme reste à l'extérieur et les travailleurs appellent à continuer la lutte.
Toute notre solidarité avec les ouvrières et ouvriers de Kraft-Argentine !
La lutte des ouvriers de Kraft a suscité la sympathie d’une grande partie de la population et de plusieurs organisations au niveau national et international. C’est le cas notamment des étudiants de Buenos Aires qui se sont fortement mobilisés en bloquant des axes de circulation en solidarité avec les travailleurs Plus de 60% de la population argentine pense que le principal responsable du conflit c'est le patronat. Des délégués combatifs d’autres usines sont allés rencontrer les salariés de Kraft pour leur faire part de leur soutien.
En effet, cette solidarité est fondamentale, car si d’un côté la lutte de Kraft est exemplaire et s’inscrit dans la continuité d’une tendance à l’organisation indépendante de la bureaucratie syndicale d’une partie des ouvriers, de l’autre elle reflète une volonté consciente de la bourgeoisie pour supprimer toute organisation syndicale combative des travailleurs face aux orages de la crise économique qui s’annoncent à l’horizon. Dans le contexte de la crise du capitalisme, les « coups préventifs » des patrons, ainsi que les fortes répressions contre les travailleurs qui osent lutter, sont des méthodes auxquelles les travailleurs du monde entier doivent se préparer. Le cas de la militarisation de Kraft atteignant un degré extrême rappelant les méthodes fascistes.
C’est pour tout cela qu’il est très important d’engager une solidarité active à cette lutte héroïque de la classe ouvrière argentine. C’est dans ce sens que le sociologue états-unien James Petras a lancé une pétition internationale déjà signé par plusieurs intellectuelles, organisations et des personnalités de l’extrême gauche comme A. Callinicos, D. Bensaïd, O. Besancenot, A. Laguiller, N. Arthaud, etc. et que plusieurs rassemblements de soutien ont lieu en Amérique latine mais aussi en Europe, comme celui du 1er octobre à Paris devant l’ambassade d’Argentine.
Néanmoins, quelques semaines plus tard l’entreprise contre-attaque : le 18 août elle annonce le licenciement de 160 travailleurs dont ceux de tout le comité d'usine, sans aucune indemnité car leur licenciement serait « justifié ».
Cette attitude cynique de l’entreprise a provoqué l’indignation de l’ensemble des ouvriers du site et la réponse fut immédiate : une équipe après l’autre vote la grève en assemblée générale pour la réincorporation des 160 licenciés ! En quelques heures la production de l’usine est arrêtée et commence alors la lutte de 2600 ouvriers contre une multinationale impérialiste qui dure maintenant depuis plus de 40 jours.
Des licenciements clairement politiques
Durant la première moitié de l’année 2009, Kraft a dégagé un profit de plus de 1 milliard d’euros, c’est-à-dire une augmentation de 10,6% par rapport à l’année dernière. Donc il ne s’agit évidemment pas de licenciements dits « économiques » mais bien d’une attaque contre l’organisation syndicale des travailleurs. La direction justifie les licenciements par la « gêne » occasionnée par la grève de juillet, pourtant cette grève spontanée fût menée principalement par l’équipe de l’après-midi alors que la plupart des licenciés appartiennent à l’équipe du soir où se trouvent les délégués les plus combatifs !
En réalité, face à la crise économique, Kraft Foods a l’intention de mener une politique offensive contre les conditions de travail des ouvriers, notamment en supprimant l’équipe du soir. Non seulement cette suppression impliquerait 700 licenciements de plus, mais elle amènerait nécessairement à une augmentation des rythmes de travail pour les équipes qui resteraient. Mais pour ce faire la direction a besoin de se débarrasser du comité d'usine et de tout l'activisme combatif. La grève de juillet était alors l’occasion de licencier les « gêneurs ».
Kraft, l’Etat, l’ambassade des Etats-Unis, le patronat argentin, la bureaucratie syndicale : un Front Uni contre la classe ouvrière !
La lutte des ouvriers de Kraft Foods est sans doute le conflit ouvrier le plus important des dernières années en Argentine. Au-delà de l’ampleur qu’a pris le conflit et sa répercussion dans les médias nationaux, il intervient au milieu d’une crise politique entre les différents camps bourgeois, qui dure depuis l’année dernière et qui s’est aggravée après la défaite du parti de la présidente, Cristina Kirchner, aux élections législatives.
Dans ce contexte de crise au sommet, depuis le début de l’année, plusieurs luttes se sont développées. Celles-ci se caractérisaient par leur radicalité dans la lutte contre le patronat et ses plans de licenciements, par l’unité entre intérimaires et travailleurs effectifs et par leur organisation antibureaucratique qui reposait sur la volonté de la base. Dans ce même contexte, il nous faut naturellement mentionner la grande victoire obtenue début août par les ouvrières et ouvriers de l’usine autogérée Zanon qui ont arraché l’expropriation définitive au gouvernement provincial ; expropriation à laquelle la bureaucratie de la CGT s’était opposé en disant que l’ « on était en train de donner l’usine aux gauchistes ».
La lutte des ouvriers de Kraft s’inscrit dans ce mouvement ouvrier. Elle est un exemple d’organisation des travailleurs indépendante des bureaucraties syndicales. C’est pourquoi les capitalistes locaux, l’Etat et la bureaucratie syndicale ont fait un front uni avec la direction de Kraft contre les travailleurs. En effet, les patrons locaux regroupés dans l’Union Industrielle Argentine et dans la Coordination des Industries de produits de l’Alimentation – dirigée par un ex-fonctionnaire de la dictature - avaient exigé au gouvernement une « solution immédiate » à l’occupation illégale de l’usine, autrement dit, qu’il fallait vite réprimer cette grève. La bureaucratie syndicale, quant à elle, déclarait que la répression qui s’annonçait contre les ouvriers était le « destin de ceux qui osent lutter contre son autorité ».
Ainsi le vendredi 25 septembre la répression exigée par la direction et le patronat local et, en quelque sorte, souhaitée par la bureaucratie syndicale, frappa les ouvrières et ouvriers en grève. Des centaines de policiers avec des chiens d’attaques et la police montée, ont tiré avec des balles en caoutchouc et des gaz contre la foule qui soutenait à l’extérieur les ouvriers qui occupaient l’usine. La police a ensuite chargé contre les ouvriers à l’intérieur de l’usine alors même que ceux-ci, en voyant l’énorme opération répressive, avaient décidé de sortir pacifiquement sans affrontement avec la police. Le soir même le site était devenu un centre de détention où l’on interrogeait les ouvriers interpellés, à l’image de ce qui se faisait sous la dictature fasciste argentine.
(Vidéo de la répression)
Aujourd’hui l’usine est militarisée avec 300 policiers à l’intérieur derrière les ouvriers forcés de reprendre le travail. La direction a suspendu des ouvriers soupçonnés d’avoir soutenu la lutte des licenciés, elle fouille les casiers des travailleurs et ne laisse entrer aucun délégués. Chez Kraft Foods-Argentine la dictature capitaliste est plus claire que jamais !
Malgré le fait que l’activité a repris sous la menace de suspension et sous la militarisation de l’usine, la lutte n’est pas terminée. Bien que la direction ait consentie à réintégrer 30 des ouvriers licenciés, le comité d'usine et une grande partie de l'activisme reste à l'extérieur et les travailleurs appellent à continuer la lutte.
Toute notre solidarité avec les ouvrières et ouvriers de Kraft-Argentine !
La lutte des ouvriers de Kraft a suscité la sympathie d’une grande partie de la population et de plusieurs organisations au niveau national et international. C’est le cas notamment des étudiants de Buenos Aires qui se sont fortement mobilisés en bloquant des axes de circulation en solidarité avec les travailleurs Plus de 60% de la population argentine pense que le principal responsable du conflit c'est le patronat. Des délégués combatifs d’autres usines sont allés rencontrer les salariés de Kraft pour leur faire part de leur soutien.
En effet, cette solidarité est fondamentale, car si d’un côté la lutte de Kraft est exemplaire et s’inscrit dans la continuité d’une tendance à l’organisation indépendante de la bureaucratie syndicale d’une partie des ouvriers, de l’autre elle reflète une volonté consciente de la bourgeoisie pour supprimer toute organisation syndicale combative des travailleurs face aux orages de la crise économique qui s’annoncent à l’horizon. Dans le contexte de la crise du capitalisme, les « coups préventifs » des patrons, ainsi que les fortes répressions contre les travailleurs qui osent lutter, sont des méthodes auxquelles les travailleurs du monde entier doivent se préparer. Le cas de la militarisation de Kraft atteignant un degré extrême rappelant les méthodes fascistes.
C’est pour tout cela qu’il est très important d’engager une solidarité active à cette lutte héroïque de la classe ouvrière argentine. C’est dans ce sens que le sociologue états-unien James Petras a lancé une pétition internationale déjà signé par plusieurs intellectuelles, organisations et des personnalités de l’extrême gauche comme A. Callinicos, D. Bensaïd, O. Besancenot, A. Laguiller, N. Arthaud, etc. et que plusieurs rassemblements de soutien ont lieu en Amérique latine mais aussi en Europe, comme celui du 1er octobre à Paris devant l’ambassade d’Argentine.
Vive la lutte des ouvrières et ouvriers de Kraft Foods-Argentine !
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