Scandale dans l’habitat
social : menaces d’expulsion pour délit de solidarité
Damien
Bernard et Flora Carpentier, NPA Saint-Ouen
Ce lundi 15 décembre, les locataires des HLM du 41 rue
Dhalenne à Saint-Ouen ont trouvé dans leurs halls d’immeubles des affichettes
les menaçant d’une procédure d’expulsion en cas de « non-respect du
règlement intérieur ». Les deux motifs d’expulsion évoqués sont l’ouverture des
« portes d’entrée sécurisées par digicode des halls d’immeuble pour permettre
l’accès des locaux communs à des sans-abri » et la fourniture à des
sans-abri de « tout élément ‘logistique’ ou si vous les nourrissez,
les incitant par-là même à demeurer sur les lieux squattés.» Le bailleur social
place de fait les SDF au même niveau que « les pigeons » qu’il ne
faut pas nourrir car cela les inciterait à revenir !
Un habitat
« social » pour les classes populaires ?
Alors que le rôle soi-disant attribué à ces offices
HLM est de loger les travailleurs pauvres et précaires, la généralisation
de la semi-privatisation de l’habitat social a précipité ces organismes dans la
logique marchande, celle de la rentabilité à tout prix. C’est ainsi que les
nouveaux programmes de logements sociaux sont en réalité destinés aux classes
moyennes plutôt qu’aux travailleurs, avec des loyers qui se rapprochent de ceux
du parc privé, et l’exigence de garanties financières qui n’ont rien à envier
aux agences immobilières classiques, fermant la porte aux plus précaires.
Cette logique de course au profit s’est
matérialisée dans le cas de l’office HLM Saint-Ouen Habitat Public par
l’interdiction aux locataires d’exprimer leur solidarité de classe vis-à-vis
des SDF, en les laissant dormir dans un endroit un peu moins hostile que la
rue, ou en leur donnant de quoi manger.
Les
sans-abri, une population exclue et stigmatisée
Ces cas ne sont pas isolés et sont à placer dans le
contexte d’une politique généralisée de criminalisation et de stigmatisation
des SDF, à travers l’application d’arrêtés anti-mendicité utilisant, par
exemple à Argenteuil, des produits chimiques malodorant pour « écarter les
sans-abris de certaines zones », ou encore à Paris, la mise en place de différents
types d'équipements urbains cherchant à dissuader les personnes sans-abri de
s'asseoir ou de s'allonger.
Ne se suffisant pas de la situation déjà
extrêmement précaire des SDF, dont le nombre ne cesse d’ailleurs d’augmenter
atteignant près de 44% de hausse en onze ans, il s’agit alors pour ces
municipalités gérant les institutions capitalistes, de mettre encore plus au
ban de la société, ces SDF qui souffrent déjà terriblement, avec une espérance
de vie comprise entre 40 et 50 ans, cela au nom de la « réputation »
de leurs villes et de la « sacrosainte » propriété privée qui ne sert
que ceux qui possèdent.
Alors que cette solidarité de classe, organisée spontanément
par les habitants des HLM du 41 Dhalenne, s’avère nécessaire. Celle-ci ne peut
suffire à régler le principal problème, c'est-à-dire l’existence même de
personnes sans domicile fixe alors même qu’il y a près de 2 millions de
logement vacants en France et 4,43 millions de mètres carrés de bureaux vides
en Ile-de-France.
La
« chasse aux trafiquants » serait-elle plus légitime ?
Face à l’indignation des habitants, relayée dans de
nombreux médias, la direction de Saint-Ouen Habitat Public s’est empressée de
publier un nouveau communiqué s’excusant de sa « communication pour le
moins extrêmement maladroite », et expliquant que l’avertissement avait
pour but de « lutter en priorité contre les trafiquants de drogue ».
Nous voudrions déjà leur rappeler que s’il y a du trafic de drogues à
Saint-Ouen, c’est bien parce qu’il y a des acheteurs, venus le plus souvent des
banlieues riches ou des beaux quartiers parisiens. Donc rien ne sert de
stigmatiser les « violents dealers » qui rendent service à bien du
beau monde. Contrairement à ce qu’on voudrait nous faire croire, le problème
des banlieues, ce n’est pas la drogue mais le chômage de masse, la misère économique
qui frappent durement notre département et n’offrent aucune perspective aux
jeunes.
Cette situation, ce sont les gouvernements
successifs de gauche comme de droite qui l’organisent, la maintiennent et
l’aggravent au plus grand profit du patronat, des propriétaires spéculateurs et
des marchands de sommeils qui eux ont pignon sur rue. Alors que ceux-là vivent
de l’exploitation des travailleurs, ils tentent de nous diviser, les SDF contre
les logés et les mal-logés, les « bons » et les « mauvais »
chômeurs, les sans-papiers et ceux qui ont des papiers, ceux qui travailleurs
et ceux qui « trafiquent ».
Leur guerre contre la drogue n’est autre qu’un
prétexte pour stigmatiser les jeunes des banlieues, et justifier une politique
répressive, de contrôle au faciès et ultra-sécuritaire. Au NPA, nous défendons
la légalisation des stupéfiants et leur commercialisation par l’Etat, accompagnées
d’une politique de sensibilisation et de prévention à l’école, seule solution
non-hypocrite pour casser les trafics, les mafias et leurs complices, qui ne
sont nullement les jeunes que l’on cherche à réprimer.
Saint-Ouen,
la spéculation immobilière et l’exclusion des classes populaires
A Saint-Ouen, on assiste à une spéculation sans
limites qui a commencé il y a plusieurs années avec la destruction
d’habitations précaires au profit de la construction de sièges d’entreprises,
qui s’est illustrée en 2008 puis en 2013 par la violente expulsion des camps de
rroms du quartier des Docks, qui s’est poursuivie cette année avec l’expulsion
sans relogement des jeunes travailleurs du Foyer Cara, et qui se matérialise
aujourd’hui avec la « chasse » au SDF.
On voit bien qu’avec une mairie Front de Gauche ou
avec l’actuelle mairie dirigée par la droite depuis les élections municipales
en mars dernier, la logique reste la même, celle d’une gentrification au
service des grandes entreprises et au désavantage des classes populaires, des
jeunes travailleurs, des mal-logés et des SDF. Leur objectif, c’est de
contraindre les pauvres à se loger toujours plus loin de la capitale, pour reléguer
définitivement la mémoire ouvrière et populaire de Saint-Ouen aux livres
d’histoire, se refaire une image d’une ville « dynamique » et
« saine » aux portes de Paris, et ainsi espérer attirer un peu plus
les touristes et les populations aisées.
Contre la
fermeture du foyer Cara et la stigmatisation des SDF, un toit, c’est un
droit !
Contre ce mépris de classe, le NPA Saint-Ouen était
présent au rassemblement organisé par le DAL ce samedi 20 décembre à 11h, qui a
réuni environ 80 personnes devant la Mairie de Saint-Ouen, pour exiger
« un toit pour tous » et dénoncer la stigmatisation des classes
populaires.
Face à l’intervention d’élus Front de Gauche ayant
dirigé la mairie avant son basculement à droite, nous avons été plusieurs à
dénoncer leur illégitimité à intervenir alors qu’ils ont eux-mêmes organisé il
y a quelques mois la fermeture du foyer Cara sans solution de relogement,
situation qui perdure jusqu’à aujourd’hui. Après l’intervention d’une des
jeunes travailleuses du Cara, le rassemblement a décidé de partir en
manifestation jusqu’au foyer pour réclamer sa réhabilitation et le relogement
de tous ses résidents, ainsi que la régularisation de la situation des personnels
du foyer, dont les salaires ne sont pas versés depuis le mois dernier.
Ne nous trompons pas de combat,
ce sont les gouvernements UMPS et le patronat qui sont responsables de
l’existence même du « concept » de SDF, du mal logement, du chômage,
de l’expulsion des Rroms et des sans-papiers, tout cela au profit d’une
minorité : ceux qui nous gouvernent et nous exploitent.
Au NPA, nous continuerons à lutter pour :
·
La réquisition et la réhabilitation des
logements et bureaux vides !
·
Le relogement de tous les SDF ou mal logés dans
des conditions dignes !
·
La construction de logements neufs de qualité et
accessibles à tous !
un colistier du NPA qui a voté Delannoy en mêlant sa voix à celles de la droite de l'extrême droite du PS d'EELV est lui légitime a parlé au nom des locataires?
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